"Il est des bonheurs dont on se dit qu'il faut les préserver de l'oubli non pas parce qu'ils sont grands ou extraordinaires mais parce qu'ils sont contagieux. On les note parce que tout d'abord on les a ressassés cent fois. Les remémorations qui engagent peu à peu notre volonté procurent une chaleur qui ne procèdent plus de leurs contenus. Insensiblement ils se sont narrés au fond de nous tout seuls. Une étrange cuisson les a perfectionnés. Nous nous disons en les examinant : Comme les moments du passé étaient capables de communiquer leur énergie et leurs joies, quand nous les relirons, ils répéteront leur pouvoir. Alors, une fois que nous nous serons placés sur leur orbite, nous deviendrons plus heureux."
Pascal Quignard, Sur le jadis, Grasset, p. 13, 2002
Pourquoi brusquement cette citation de Pascal Quignard ? En ce moment a lieu à la Maison de la poésie, un spectacle d'Arnaud Meunier sur ce thème. C'est un montage de textes très intelligent qu'a réalisé ce metteur en scène : Baudelaire ("mais le vert amour des paradis enfantines..."), Voltaire et son dictionnaire philosophique, Pascal et ses pensées, Gide et son Nathanaël mais également des textes contemporains de Lydie Salvayre, de Le Clézio, de Michel Houellebecq et même une enquête du Courrier International. Accompagnant cette conversation entre trois comédiens, le violon de Régis Huby apporte harmonie et respiration à ces différents textes.
Et pour terminer une autre citation dans un livre que je lis en ce moment :
"Comment rester présent ? D'abord en cessant de croire que le bonheur adviendra. À bien y songer, il n'est pas du tout sûr que nous soyons plus comblés qu'hier. Alors pourquoi pensons-nous que le futur nous rendra fondalement plus heureux ? Non la réalisation de nos rêves ne nous rapproche pas nécessairement de la félicité."
Alexandre Jollien, La construction de soi, un usage de la philosophie, p.35, Seuil, 2006
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